L’enthousiasme du Jardinier est
contagieux : comment ne pas admirer l’inventivité dont fait
preuve telle plante pour se reproduire, conquérir le terrain,
apprendre à se cacher durant les périodes difficiles et renaître
quand les circonstances redeviennent favorables. Les plantes, fleurs
et arbres, se muent sous nos yeux en un véritable peuple, le végétal
alternant stratégies à long terme et coups de génie tactique au
profit de l’espèce : la survie comme seul mot d’ordre.
La variété des parterres, la
luxuriance des herbes, des fleurs, des buissons de toutes espèces,…
peuvent laisser croire à une promenade au cœur d’un jardin
tropical de toutes les couleurs. La pourpre des digitales, le safran
des pavots de Californie, le bleu des lavandes des Canaries, les
nuances mauves des giroflées arbustives ou des géraniums de Madère,
nos yeux en prennent plein la vue ! Tout comme les insectes que
les plantes ont littéralement appris à utiliser au profit de leur
descendance.
Et hop ! Nouveau bond en arrière,
juste 125 millions d’années, pour assister en direct – et en
Technicolor, s’il vous plaît ! – à l’invention des
pétales. Un véritable coup de génie végétal que cette trouvaille
des plantes à fleurs qui, jusque là, ne comptaient que sur le vent
pour disperser leur pollen !
C’est là que le nombre de plantes à
fleurs explosé. Variations de couleurs à l’infini, de formes, de
parfums,… tout pour séduire, appâter et même récompenser à
coups de nectar papillons, guêpes, bourdons, abeilles ou petits
oiseaux. Depuis, chacun y trouve son compte, certaines fleurs ont
littéralement transformé la zone d’atterrissage en enseigne de
bar, boissons en libre service à l’intérieur ! A l’entrée
ou à la sortie du débit de boisson, l’insecte se trouve chargé
de pollen… qu’il transportera gratuitement jusqu'aux organes
femelles de la prochaine fleur. Merci l’insecte !
Au bout du compte, une descendance :
des graines. Quelques unes seulement, ou parfois des centaines.
Petit coup de chapeau au pavot somnifère (Papaver
somniferum L. ), détenteur du record en nombre de graines par
fleur !
Ici, les vipérines géantes1
se croient à Madère ou aux Canaries : elles montent à
plusieurs mètres ; là, tout à côté de la maison, un palmier
de 6 mètres planté il y a plus de 30 ans porte sur son « tronc »
une orchidée épiphyte2
qui se trouve là aussi heureuse que sous les tropiques. Il faut dire
que jardinier d’ici n’est pas revenu les mains vides de là-bas.
Toutes les plantes qui nous entourent sont issues de ses propres
graines, parfois de boutures ou semis offerts par des amis. Monsanto
et Bayer ne font pas fortune avec lui !
Chaque fleur, chaque buisson, chaque
arbre a une histoire à raconter. Et le Jardinier traduit pour nous
la parole de la fleur, du buisson, de l’arbre. Chaque plante à
quelque chose à nous dire à propos de ses origines, de son passé
lointain3,
du pays d’où il ou elle vient4,
de la région du globe d’où un explorateur5
l’a rapportée pour la première fois, des soins que le Jardinier
lui a prodigués pour qu’elle profite de l’étonnant climat de
Belle-Ile-en-Mer où il a choisi de l’installer.
Dans le jardin qu’il partage avec
nous, en ce matin de juin : L’Eden du Voyageur.
À Belle-Ile-en-Mer, le 25
juin 2017.
« Loin, très
loin…, là-bas au cœur de la savane, vivait un arbre plus grand et
plus vieux qu’aucun autre arbre. Et sous son écorce d’arbre, il
abritait toute la sagesse de l’Afrique. […] »
(Do Spillers,
L’Arbre qui parle,
éditions Milan).
1
Variétés tropicales de la vipérine commune, petite plante de 50 à
80 cm chez nous.
2
Plante qui en utilise une autre comme support, au lieu de pousser en
terre.
3
Un brin de paléobotanique n’est pas pour faire peur à notre
Jardinier.
4
Un nombre étonnant de plantes de l’Eden du Voyageur
proviennent de régions tropicales.
5
Un Jardinier historien, même Carl von Linné n’aurait pas trouvé
où le ranger dans sa classification !
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